La TRADITION : humaine et faillible ?

La grande TRADITION DE L’ÉGLISE est constitutive de la foi et de la doctrine catholiques. Mais les autres églises la dénigrent comme un ensemble de doctrines et préceptes humains qui finissent par altérer, voire contredire la doctrine biblique.

La TRADITION dans l’Église catholique est donc au cœur de tous les litiges entre l’Église catholique et les autres églises.

 

La Tradition dans la Bible

>> On appelle tradition un enseignement transmis de génération en génération (tradition = transmission). Nous le savons, Jésus n’a rien écrit. L’Église du premier siècle fut bâtie sur l’enseignement des apôtres, qui fut d’abord oral, et ensuite consigné dans les évangiles, avec les épitres apostoliques et autres écrits néotestamentaires. (Voir Lc 1,2)

>> Une tradition apostolique a donc précédé les écrits du Nouveau Testament. Cette tradition, appelée encore « dépôt » de la foi, était considérée comme norme de la foi.

– « Frères, tenez bon, gardez fermement les traditions que vous avez apprises de nous, de vive voix ou par lettres » (2 Thess 2,15 ; 3,6 ; ‘tas paradoseis as édidaxthète’ en grec signifie ‘les traditions dont vous avez été enseignés’, ce qui est traduit dans certaines bibles par instructions ou enseignements).

– « Ce que vous avez appris, reçu, entendu de moi et constaté en moi, voilà ce que vous devez pratiquer » (Phil 4,9).

– « Prends pour norme les saines paroles que tu as entendues de moi… Garde le bon dépôt, avec l’aide de l’Esprit Saint qui habite en nous »  (2 Tim 1,14 ; voir encore 1 Tim 6,20 et 2 Tim 3,14). 

Cette Tradition, « dépôt », « norme » de la foi, ou « instructions », n’a pu être totalement consignée dans la Bible : « Jésus a fait encore beaucoup d’autres signes, qui ne sont pas écrits dans ce livre » (Jn 20,30 ; 21,25). — « J’aurais beaucoup de choses à te dire. Mais je ne veux pas le faire avec de l’encre et la plume. J’espère te voir bientôt, et nous nous entretiendrons de vive voix » (3 Jn v. 13-14).

Paul déclare : « L’Église est la colonne et l’appui de la vérité » (1 Tim 3,15). Il le dit de l’Église et non de la Bible !! (Sur la transmission de la Révélation divine, voir Cat Égl Cath, n° 74 à 87)

Le rapport entre la Tradition et l’Écriture Sainte

Cat. Égl. Cath. n° 80 – 82 – 83 :

« Une source commune : Elles sont reliées et communiquent étroitement entre elles. Car toutes deux jaillissent d’une source divine identique, ne forment pour ainsi dire qu’un tout et tendent à une même fin. L’une et l’autre rendent présent et fécond dans l’Église le mystère du Christ qui a promis de demeurer avec les siens « pour toujours, jusqu’à la fin du monde » (Mt 28, 20). »

« Mais deux modes distincts de transmission. La Sainte Écriture est la parole de Dieu en tant que, sous l’inspiration de l’Esprit divin, elle est consignée par écrit.

Quant à la sainte Tradition, elle porte la parole de Dieu, confiée par le Christ Seigneur et par l’Esprit Saint aux apôtres, et la transmet intégralement à leurs successeurs, pour que, illuminés par l’Esprit de vérité, en la prêchant, ils la gardent, l’exposent et la répandent avec fidélité.

Il en résulte que l’Église à laquelle est confiée la transmission et l’interprétation de la Révélation, ne tire pas de la seule Écriture Sainte sa certitude sur tous les points de la Révélation. C’est pourquoi l’une et l’autre doivent être reçues et vénérées avec égal sentiment d’amour et de respect. »

En résumé, la sainte Tradition de l’Église porte, transmet, interprète et explicite ce qu’elle reçut dans les premiers temps apostoliques, et qui fut ensuite consigné dans l’Écriture sainte du Nouveau Testament.

Sainte Tradition et Écriture sainte sont donc inséparables, comme les deux ailes de l’oiseau. La nature nous enseigne ici par son bon sens ; que dire alors de ceux qui ne jurent que par « la Bible seule » !?

Importance de la Tradition de l’Église

1. Distinguons la grande Tradition de l’Église et les multiples traditions particulières dans l’Église.

Cat. Égl. Cath. n° 83 :

« Il faut distinguer la grande Tradition et les « traditions » théologiques, disciplinaires, liturgiques ou dévotionnelles nées au cours du temps dans les Églises locales. Elles constituent des formes particulières sous lesquelles la grande Tradition reçoit des expressions adaptées aux divers lieux et aux diverses époques. »

2. La Tradition atteste l’authenticité des écrits bibliques. C’est en référence à cette Tradition que, vers le 4e s., l’Église a pu déterminer le ‘canon’ des Écritures, les écrits bibliques reconnus comme inspirés par l’ensemble des chrétiens. (Sur ce point, voir Des bibles différentes)

3. La Tradition garantit la juste interprétation de la Bible. Lire et comprendre la Bible ne peut se faire sans guide. L’apôtre Pierre le dit clairement au sujet des épîtres de Paul ou des autres écritures : « Il y a des points difficiles à comprendre, dont les personnes ignorantes et mal affermies tordent le sens, comme celui des autres Écritures, pour leur propre ruine. » (2 Pi 3,15-16). — « Aucune prophétie de l’Écriture n’est objet d’interprétation personnelle » (2 Pi 1,20).

L’école de la juste interprétation de la Bible, c’est précisément la grande Tradition chrétienne, qui remonte aux apôtres et aux pères de l’Église. C’est cette Tradition qui est l’arbitre et la gardienne de la bonne interprétation de la Bible – selon l’Église catholique. Sortir de cette Tradition, c’est s’exposer à toutes les déviations possibles. D’où les hérésies et les sectes. Et les mésententes qui provoquèrent et provoquent encore la multiplicité des églises.

La Tradition explicite les vérités bibliques

>> Les racines de la Tradition vivante de l’Église se trouvent dans la Bible elle-même. Voir comment « les apôtres, les anciens, et toute l’Église », réagirent à la querelle concernant la conversion des non-juifs à la foi chrétienne et au trouble jeté dans leur esprit par les judaïsants. « Il a paru bon au SAINT-ESPRIT et à nous (les apôtres), de ne pas vous imposer d’autre charge que ce qui est nécessaire… » (Actes 15,23-29) Pourquoi ce fonctionnement de l’Église primitive ne serait-il plus possible dans les siècles suivants ?

>> Face aux hérésies et aux sectesl’Église a très vite dû défendre, formuler et expliciter sa foi. Ce fut la naissance des dogmes (vérités clairement définies) et de la réflexion théologique. C’est cette réflexion théologique qui a explicité la plupart des questions abordées dans ce chapitre.

>> Il est clair aussi que la Bible ne répond pas textuellement à tous les problèmes de l’humanité. (Par exemple aux nouveaux problèmes posés par la bioéthique ou les technologies modernes.) Dans ce cas, la réflexion théologique s’impose. La Bible ne nous dispense pas de réfléchir et d’être intelligent. Tout cela construit la sainte Tradition chrétienne et fait de l’Église « la colonne et l’appui de la vérité » (1 Tim 3,15).

3.   La Tradition peut-elle se tromper ? Les traditions humaines sont sujettes au péché et à l’erreur. Dans l’histoire de l’Église, il y eut des traditions non conformes à la foi et à la véritable Tradition chrétienne. L’Église a toujours veillé à corriger ou supprimer ces traditions douteuses ou erronées. (cf. Cat Égl cath 83)

MAIS la grande Tradition de l’Église n’est pas comparable à ces traditions humaines et faillibles. Elle ne peut s’égarer dans la mesure où elle est en constante continuité et référence à la foi des apôtres et des pères de l’Église. Son critère de fidélité à la Révélation est de « s’en tenir soigneusement à ce qui a été écrit partout, toujours et par tous » [l’ensemble des chrétiens] (célèbre règle de St Vincent de Lérins, 5e s.).

C‘est ce critère d’universalité de la foi qui vaut à l’Église et sa Tradition leur qualificatif de « CATHOLIQUE » (= universelle en grec). Ainsi, l’Église ne pourra jamais inventer un dogme en contradiction avec ce qu’elle a reçu des saintes Écritures et de la Tradition antérieure. Sa foi et sa piété doivent toujours s’enraciner dans la Parole de Dieu et dans la foi des premiers chrétiens.

CONCLUSION

« L’Église est la colonne et l’appui de la vérité » (1 Tim 3,15).

La Tradition chrétienne joue un rôle essentiel dans la foi de l’Église catholique. Elle est le canal transmetteur de la foi dans lequel il faut lire et interpréter la Bible.

Sortir de la sainte Tradition, c’est courir le risque d’interpréter la Parole de Dieu chacun à sa façon (cf. 2 Pi 1,20 et 3,15-16 cités ci-dessus). Ce que nous constatons partout et de tous temps dans l’histoire de l’Église.

Le plus sûr moyen de rester fidèle à l’enseignement du Christ, de la Bible (son interprétation), et de l’Esprit Saint, est de demeurer dans la Tradition. Bible et Tradition chrétienne sont liées dans la foi catholique : la Bible est à lire et à comprendre selon la sainte Tradition, c’est-à-dire en Église.

Penser que la Tradition de l’Église nous a détournés de la vérité, c’est prétendre que Dieu a abandonné son peuple à l’erreur. Cela revient à nier la présence de l’Esprit Saint dans l’Église, l’Esprit de Vérité promis par Jésus à tous ses disciples (cf. Jn 16,13 et Mt 16,18).

L’Esprit Saint ne s’est pas contenté d’inspirer seulement l’Écriture Sainte et les premiers disciples de Jésus. Il ne s’est pas envolé ensuite. Les promesses de Dieu valent jusqu’à la consommation des siècles. En tout cas pour le christianisme version catholique.

« Je suis avec vous pour toujours jusqu’à la fin du monde » (Mt 28,20).

« L’Esprit de Vérité vous guidera vers la Vérité tout entière »  (Jn 16,13).

« Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église, et les portes du séjour des morts ne l’emporteront pas sur elle »  (Mt 16,18).

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