Des BIBLES différentes

Dans les bibles catholiques et les bibles protestantes, le nombre des livres bibliques ou « canoniques » varie.

66 Livres pour les bibles protestantes (Louis Segond, Semeur, Darby, etc.) ;

73 pour les bibles catholiques (Jérusalem, Crampon, etc.). La bible TOB (Traduction œcuménique de la B.) intègre les deux listes.

Les livres bibliques discutés sont des livres de l’Ancien Testament. 7 à 8 livres en plus dans l’antique tradition catholique : Judith – Tobie – 1 et 2 Maccabées – Sagesse – Siracide ou Ecclésiastique – Baruch, et quelques passages de Jérémie, Esther, Daniel.

La tradition catholique considère que ces livres sont d’inspiration divine. Ils sont canoniques comme faisant partie du canon ou de la liste officielle des Saintes Écritures (du grec ‘canon’  = règle). Mais ils sont classés dans le deuxième canon écrit seulement en grec (d’où ‘deutéro-canonique’). La tradition protestante ne les reconnaît pas comme inspirés, et les nomme apocryphes (= cachés, d’origine douteuse).

Une regrettable confusion : Les deutérocanoniques, dits « apocryphes » dans la tradition protestante, ne sont pas à confondre avec les « évangiles apocryphes » unanimement refusés dans l’ensemble des églises, car d’origine tardive, et surtout légendaire, aux relents gnostiques ou hérétiques (les évangiles de Pierre, de Barnabé, etc.).  Voir Les évangiles APOCRYPHES  2.4

Pourquoi ces différences ?

>> Déjà avant Jésus-Christles écrits de l’Ancien Testament existaient sous deux versions différentes : une version hébraïque, et une version destinée aux juifs de culture grecque, la Septante (achevée vers 150 av. JC.). Cette version comprenait, en plus de la version hébraïque, les écrits mentionnés ci-dessus, uniquement en grec. Donc, à cette époque, bien avant le Christ, les livres écrits en grecs, les deutérocanoniques, étaient bel et bien considérés comme inspirés dans le monde juif (voir ici).

>> La constitution du canon chrétien s’est faite par étapes durant les 4 premiers siècles. (Meilleure présentation ici) Les livres deutérocanoniques de la Septante furent reconnus comme authentiques et inspirés par la grande majorité des ‘pères’ de l’Église et les premiers écrivains chrétiens (ici ; même St Jérôme à la fin de sa vie). C’est ce canon qui fut ainsi transmis dans la grande Tradition (transmission) catholique et orthodoxe.

>>  Les deutérocanoniques s’inscrivent dans la pensée biblique et chrétienne. On trouve leur influence ou leur reprise dans mains écrits du Nouveau Testament (liste ici et ici). Par ex. Sagesse 7,26 et 13,15 qui a manifestement inspiré Rom 1,18 s. (Dieu se révèle en sa création) ; ou Sagesse 2,12-20, qui annonce en détail, mot pour mot, le complot et le procès des pharisiens contre Jésus dans les évangiles (voir ici).

>> Dans une réaction anti-chrétienne, le judaïsme rabbinique n’accepta que le canon hébraïque de l’Ancien Testament (Concile de Jamnia, vers 90 ap. JC), afin d’entraver la propagation du christianisme (ici). Cette opposition n’influença en rien le corpus de la Parole de Dieu dans l’Église primitive, qui demeura celui de la Septante, avec les deutérocanoniques.

>> C’est ce canon rabbinique qu’adopta Luther. Mais celui-ci ne supprima pas pour autant les deutérocanoniques. Il les regroupa à la fin de sa bible, indiquant que ces livres ne lui semblaient pas inspirés, mais que leur lecture restait édifiante (ici). Cependant, Luther s’en prit à des livres du Nouveau Testament ! Pour lui, l’épitre de Jacques était une « d’épitre de paille », car elle contredisait sa doctrine de la foi sans les œuvres. Mais il n’osa pas la virer de la Bible. Il en fut de même pour l’épitre aux Hébreux, Jude, et l’apocalypse de Jean qui, heureusement, ne disparurent pas du canon protestant. Notons que les deutérocanoniques furent maintenus dans les bibles protestantes… jusqu’au 19e siècle !

>> Ce n’est qu’au 19e siècle que fut publiée et distribuée une bible de 66 livres expurgée des deutérocanoniques. (Quoique la Bible Martin du 18e s. ne comportait déjà plus les deutérocanoniques.) Donc, de Luther jusqu’au 18-19e siècle, les deutérocanoniques étaient encore conservés dans les bibles protestantes. (Voir ici)

>> Bien sûr, les divers arguments excluant les deutérocanoniques de la Bible nécessitent une réponse. (Voir iciici et ici : 5 mythes sur les deutérocanoniques). Une chose est sûre : si les deutérocanoniques contredisaient la foi chrétienne des premiers siècles, l’Église elle-même les aurait exclus du corpus biblique.

Ces différences sont-elles si graves ?

Doit-on vraiment parler d’apocryphes ? Ou de bibles incomplètes ? Ou de ‘mauvaises’ bibles ?

>> Posons-nous la question : Quels sont les apports vraiment essentiels des deutérocanoniques à la foi chrétienne ? Et quels sont les catholiques qui connaissent les deutérocanoniques et leur message ? Ou qu’est-ce qui manque à la foi d’un protestant ignorant ces livres ?

On doit bien sûr citer ici la prière pour les morts en 2 Maccabées 12,18-45, livre deutérocanonique refusé dans les bibles protestantes — d’où l’incompréhension des messes pour les défunts dans le catholicisme. (Ce qui serait pourtant suggéré en 1 Cor 15,29 avec le « baptême pour les morts ». Voir Peut-on prier pour les DÉFUNTS ?) Et puis quoi encore ? Bien sûr, on peut regretter que les bibles protestantes se privent des joyaux des deutérocanoniques : les livres de Sagesse, de Tobie, de Judith, de Daniel 13 (histoire de Suzanne), ou encore la sagesse du Siracide (Ecclésiastique)…  Nous invitons nos frères des autres églises à découvrir ces trésors.

>> Ce qui est le plus regrettable dans cette querelle des deutérocanoniques, ce sont les accusations réciproques entre nos diverses églises. La différence entre les bibles de tradition catholique (et orthodoxe) et celles de tradition protestante ne concernent que quelques livres de l’Ancien Testament. Cela doit-il nous diviser à ce point ? Est-ce une raison de rejeter les bibles protestantes – ou catholiques — comme ‘mauvaises’ ? (Hormis d’éventuelles et rares questions de traduction. Et hormis la Traduction du monde nouveau des Témoins de Jéhovah, qui elle, est volontairement falsifiée, et unanimement dénoncée dans toutes les églises.)

En fin de compte, ce qui nous sépare, ne serait-ce pas surtout des accusations ou des incompréhensions qui pourraient se résorber dans un vrai dialogue, avec la découverte des deutérocanoniques dans leur contenu et leur histoire ?

Voir le beau dialogue entre un catholique et un protestant sur la question. La Bible TOB (Traduction Œcuménique de la Bible) en est une belle preuve. Ainsi que les publications de l’Alliance Biblique Universelle, d’origine protestante, qui propose des bibles avec les deutérocanoniques pour les catholiques.

>> Il reste néanmoins cette question de fond : QUI détermine le canon des saintes Écritures ? Une chose est sûre : le canon des Écritures n’est ni inscrit ni défini dans la Bible elle-même.

Alors, qui a défini le canon des saintes Écritures  ? Et qui en a l’autorité pour cela ? Nous n’avons guère le choix : Soit c’est l’Église dans sa tradition originelle, depuis la Septante et les ‘pères’ des premiers siècles. — Sinon, c’est la tradition rabbinique, opposée au christianisme (concile de Jamnia), que suivit Luther.

La réponse s’impose quand on voit comment c’est dans et par l’Église que la Bible prit forme et fut reconnue comme le corpus des Ste Écritures révélées. (Voir ici)





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